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E1 : quel est ce projet de colonisation israélien qui fait polémique ?

Alors que le Hamas venait d’accepter une nouvelle proposition de cessez-le-feu transmise par les médiateurs égyptiens et qataris, l'occupation a choisi une tout autre voie. En effet, mercredi 20 août, les autorités israéliennes ont validé la construction de 3.400 logements dans la zone dite E1, en Cisjordanie occupée, un projet dénoncé comme une menace directe pour toute perspective de paix.

Saluée par le maire de la colonie de Maalé Adoumim et défendue par le gouvernement de Benjamin Netanyahu, cette décision a aussitôt déclenché une vague de condamnations. La France, le Royaume-Uni et 19 autres pays l’ont qualifiée d’inacceptable et d’illégale au regard du droit international, exigeant son retrait immédiat.

Mais au-delà des réactions diplomatiques, une question s’impose : qu’est-ce que ce projet E1 et pourquoi est-il considéré comme l’un des plus dangereux de la politique de colonisation israélienne ?

Le projet E1, un vieux dossier qui refait surface

Le projet E1, du nom de la zone située entre Jérusalem-Est occupée et la colonie israélienne de Maalé Adoumim, prévoit la construction de 3.400 logements sur près de 12 km². Il relierait directement Jérusalem-Est à Maalé Adoumim, l’une des plus grandes colonies de Cisjordanie.

Ce plan n’est pas nouveau. Élaboré dans les années 1990, il a été plusieurs fois gelé sous la pression des alliés occidentaux d’Israël. Benyamin Netanyahu avait déjà tenté de le relancer en 2012 puis en 2020, sans succès.

Aujourd’hui, la donne a changé : le ministre israélien des Finances, figure de l’extrême droite, pousse à une mise en œuvre rapide et appelle même à l’annexion de la Cisjordanie, occupée depuis 1967.

Pour les Palestiniens comme pour la communauté internationale, les conséquences seraient dramatiques : la Cisjordanie serait coupée en deux, séparant son nord de son sud. Une telle configuration rendrait impossible l’émergence d’un État palestinien viable.

Le ministère des Affaires étrangères de l'Autorité palestinienne a jugé que cette décision compromet les perspectives de mise en oeuvre de la solution à deux Etats […] en fragmentant l'unité géographique et démographique de l'Etat palestinien.

L'Autorité voit dans ce projet  un nouveau crime de colonisation.

Vives réactions internationales

L’ONU et l’Union européenne avaient déjà tiré la sonnette d’alarme, rappelant que toutes les colonies construites en territoire occupé sont illégales au regard du droit international. Jeudi 21 août, 21 pays, parmi lesquels la France et le Royaume-Uni, ont publié une déclaration commune condamnant fermement le projet E1 et exigeant son abandon immédiat.

Dans le camp israélien, le ministre des Finances Bezalel Smotrich, figure de proue de l’extrême droite, a au contraire appelé à franchir une nouvelle étape : l’annexion pure et simple de la Cisjordanie.

Un tournant aux lourdes conséquences

La colonisation en Cisjordanie n’a jamais cessé depuis 1967, mais elle connaît une accélération inédite sous l’actuel gouvernement israélien, notamment depuis le déclenchement de la guerre à Gaza le 7 octobre 2023. Aujourd’hui, près de 500.000 colons israéliens vivent aux côtés de trois millions de Palestiniens, dans un climat de tensions grandissantes.

En validant le projet E1 alors que le Hamas venait d’accepter une nouvelle proposition de cessez-le-feu, Israël a envoyé un signal très clair : la colonisation prime sur toute perspective de règlement politique.

D'ailleurs, ce choix intervient à un moment où la communauté internationale espérait un apaisement après des mois de violences meurtrières à Gaza.

Pour de nombreux observateurs, cette décision constitue un pas de plus vers l’enterrement définitif de la solution à deux États, envisagée depuis des décennies comme le seul cadre capable de garantir un État palestinien viable aux côtés d’Israël.

Concrètement, l’extension de Maalé Adoumim à travers E1 couperait la Cisjordanie en deux, rendant impossible toute continuité territoriale pour un futur État palestinien et renforçant la mainmise israélienne sur le territoire.